Bleu Ardent / Apolline Jesupret
Tracklist
Ardeurs intimes / concerto pour violon et orchestre à cordes
01 - Vibration
02 - Contemplation
03 - Pulsion
Dans l'air du soir / pour violon solo
04 - Tendre vanille
05 - Conifère gelé
06 - Poivre rose
07 - Vapeurs d'iode
08 - Ardbeg
09 - Menthe poivrée
10 - Encens de lumière
11 - De glace / Pour piano
12 - De lave / Pour piano
13 - Bleue / Tableau symphonique
Maya Levy (violon)/ Apolline Jesupret (piano)
Musiques nouvelles (1-2-3) / Jean-Paul Dessy (Direction)
Belgian National Orchestra (13) / Jac Van Steen (Direction).
Bleu(e) comme la Terre, ardent(e) comme la Vie
C’est autour d’Ardeurs intimes, premier concerto pour violon de la plume d’Apolline Jesupret, présenté en novembre au Botanique, que se construit ce deuxième disque monographique, qui succède, en un an à peine, à Lueurs : sous l’impulsion de la violoniste Maya Levy (ah, la force des rêves – malgré ses déboires, Sigmund n’a toujours pas dit son dernier mot), dont le jeu, sensible et impliqué, nourrit la moitié des pièces, la compositrice rassemble quatre bouquets d’inspirations (tous parlent du chaud… ou du froid) et complète son image de musicienne « qui sait ce qu’elle veut », au travail à la fois exigeant et émouvant.
Construit selon la tradition classique mais repeint aux couleurs de son autrice, le concerto parle d’amour, ce périlleux et surexcitant rapprochement des âmes et des corps, des corps et des âmes : il y a d’abord l’exigence et la fougue (Vibration) ; puis vient un désarroi engourdi (Contemplation), comme l’appréhension surgie lorsqu’on se retourne sur un enivrement troublant ; alors que Pulsion, impérial, règle l’affaire par ce constat, universel, intemporel, omnipotent : l’esprit pense, la chair agit.
Comme un lien transcendant les deux albums, les six miniatures de la suite Dans l’air du soir (écrites en collaboration étroite avec la soliste) font écho aux petites pièces d’Efflorescence : ici, les senteurs (ou saveurs) prennent la place des végétaux et l’écriture, inspirée du Quatrième Prélude de Claude Debussy, plus mature mais toujours alimentée aux sonorités d’Apolline taillées par Jesupret, trace au pinceau-épée des contours décidés – mais cette fois, le travail se construit à deux et Maya Levy apporte son expérience du violon, des gestes, des techniques étendues.
Vu de la lune, ça saute aux yeux (vu du plafond – surtout s’il est bas –, c’est moins évident), notre planète est Bleue : ce tableau symphonique en trois parties, présenté aux Belgian Music Days par le Belgian National Orchestra dirigé par Jac van Steen, une autre première, focalise sur des préoccupations environnementales, de celles qui devraient nous affecter plus que les résultats sportifs, les piques des politiques ou la couleur du chapeau de la reine et rappelle avec une inquiétude larvée que la vie est précieuse, éphémère et d’un équilibre ténu. S’éteindra-t-elle, comme le final dérisoire de la pièce, en une mélancolique péripétie inachevée ?
Pour De Lave et De Glace, Apolline Jesupret est derrière le piano : la première a pour fond l’Île volcanique, la seconde, Iceberg, deux tableaux de la musicienne Julie Thériault, qui font l’art work du disque. La première parle, au travers d’une frappe vigoureuse et de sonorités vivaces, de la fusion qui libère la lave, visqueuse, menaçante, puis de son refroidissement, qui l’engourdit, la ralentit, la fige ; la seconde, aux accents déliés sans être tout à fait tranquilles, raconte la muraille du bout perdu de banquise, essentiellement tu sous l’eau, lisse d’apparence et rêche au toucher.