pour quintette à vent
Désirs de Lune
Quintette à vent, bouteilles en verre etpetite percussion résonante (14' - 2010/11)
Vous vous demandez combiend'amis ai-je ?
L'Eau et la Pierre, leBambou et le Pin.
La Lune qui s'élèveau-dessus de la colline d'Orient est aussi de
la partie, une camarade joyeuse.
A côté de ces cinqcompagnons, que demander de plus pour
autres plaisirs ?
Yon Son-do (1587-1671)
Lorsque le hautboïste Thierry Cammaert me proposa d'écrireune nouvelle œuvre pour l'Ensemble Quartz, articulée sur une thématique coréenneassez souple afin d'en faire la création à Séoul, je n'hésitai pas un instant.D'autant que l'idée de composer sur des éléments culturels en provenance d'unpays d'Asie que je n'avais pas encore investigué me fascinait au plus hautpoint. Ainsi, les pages de ces Désirs de Lune prennent-elles racines dans les multiples écoutes des sonorités issuesdu "Pays du Matin Calme", mais aussi dans les analyses de musiquestraditionnelles et de littératures d'orient. Le poème de Yon Son-do (ci-dessus) sembled'ailleurs convenir parfaitement à l'idée d'un quintette, jusqu'au point de définirla forme globale de la pièce ainsi que les questionnements humains et métaphysiques quiencadrent le sentiment joyeux de la Lune, poétique évanescente appelant àl'imaginaire bien plus qu'à l'incarnation. Toutefois la danse sera de la partie,mais une danse transparente, diaphane, étrange, bousculée par le souffle desvoix chuchotant un autre poème, issu lui aussi de la tradition du Sijo, complétant ainsi mes sources d'inspiration :
Sous les pins / Le vent est silence
Sans le vent / Les pins sont muets
Et sans toi / Mon coeur est sans voix
Et sans cette voix / mon coeur désespère
Quel pouvoir / du Ying et du Yang
Nous unit / avant de dormir ?
Anonyme (XVIe Siècle)
Dès lors, silences et dansejoyeuse s'inscrivent au coeur d'un flux duel/dialectique dans lequels'inscrivent l'une et l'autre métaphores sonores. L'eau et le souffle appellentaux jeux de "bouteilles", évoquant un réseau de respirations spirituelles dans lequel se glissent de surprenantes sonorités fantomatiques. L'invitation à la méditation (ou ausommeil "éveillé") nous est donc adressée par ces sons étranges initiés par les appels résonants du bol tibétain. Lesoreilles les plus attentives retrouveront les éléments du second poèmearticulés par les musiciens dans leur instrument respectif pour créer une danseissue des structures chorégraphiques coréennes, inscrite au centre de l'oeuvrecomme un axe de balancier autour duquel s'étalent des plages bien plusméditatives.
L'oeuvre est dédiée àl'Ensemble Quartz qui en fit la création partielle le 8 novembre 2010 àl'Ilshin Hall de Seoul. L'année suivante les dédicataires proposaient lacréation complète de ces Désirs de Lunelors de leur tournée chinoise, au Shangai Normal University Art Center.